FLASH Recherche : La santé mentale en milieux de travail en temps de pandémie

Importance des problèmes de santé mentale en milieux de travail avant et pendant la crise de la COVID-19 :

 

Les premiers résultats du cycle-1 de l’ELOSMET

Le cycle-1 de l’Étude Longitudinale de l’Observatoire sur la santé et le mieux-être au travail (ELOSMET) porte actuellement sur un échantillon de 69 milieux de travail canadiens et 4307 employé(e)s âgé(e)s de 18 ans et plus. Il s’agit d’une enquête en ligne qui est répétée chaque année pendant cinq ans. Elle aborde plusieurs dimensions de la santé et du mieux-être au travail, ainsi qu’un ensemble de conditions de travail, de situations de vie hors-travail et de caractéristiques personnelles.

La collecte de données du cycle-1, toujours en cours, s’est échelonnée de mai 2019 à octobre 2020 et le taux de réponse a été de 37,8%. Un total de 1967 personnes dans 52 milieux de travail a été interrogé pendant la pandémie de la COVID-19, dont 92,6% étaient en télétravail. Le questionnaire a été modifié afin de tenir compte de la situation provoquée par la crise sanitaire.

Le tableau suivant présente les principales caractéristiques sociodémographiques et du milieu de travail de cet échantillon.

 

Dans ce FLASH Recherche, nous présentons les prévalences obtenues pour les principaux problèmes de santé mentale qui sont au cœur des travaux de l’OSMET. Nous examinons également si des différences de prévalence sont observées en fonction du genre, de l’âge, du groupe minoritaire et de l’effet COVID-19.

Les questionnaires suivants ont été utilisés :

·Détresse psychologique: Désordres psychiatriques mineurs (symptômes dépressifs, anxiété, irritabilité, problèmes cognitifs) non-spécifiques à une maladie en particulier. Score de 4 et plus sur le General Health Questionnaire (GHQ-12)1

·Dépression: Scores de 10 et plus (symptômes modérés et plus importants) sur le Patient Health Questionnaire (PHQ-9).2

·Anxiété: Score de 10 et plus (symptômes modérés et plus importants) sur le General Anxiety Disorder (GAD-7).3

.Peur d’être contaminé en milieu de travail par le coronavirus de la COVID-19: Pourcentage des employés qui rapportent avoir beaucoup ou énormément peur d’être contaminé dans leur milieu de travail par le coronavirus de la COVID-19.

·Épuisement professionnel: Fatigue, épuisement physique et psychologique perçu par la personne comme étant lié à son travail. Score de 50 et plus (symptômes modérés et plus) sur le Copenhagen Burnout Inventory (CBI-7).4

·Consommation de médicaments psychotropes: Consommation au cours du dernier mois d’au moins un médicament de type tranquillisants (ex : diazépam, Valium), antidépresseurs (ex : fluoxetine, Prozac), opiacés (ex : codéine, Ratio-Lenoltec #3), ou somnifères (ex : zoplicone, Imovane).

Les résultats sont présentés au tableau ci-dessous :

 

Les constats sont les suivants :

  • La prévalence des atteintes à la santé mentale est importante.
  • Un peu plus d’une personne sur trois rapportent des problèmes de détresse psychologique, et entre 10% à 23% des symptômes de dépression, d’anxiété, de peur d’être contaminé par le virus de la COVID-19, d’épuisement professionnel ou consomment des médicaments psychotropes.
  • Comparativement aux hommes, les femmes rapportent davantage de problèmes liés à la santé mentale.
  • Les personnes âgées de 50 ans et plus vivent globalement moins de problèmes reliés à la santé mentale.  Les employés plus jeunes (18-34 ans) semblent plus particulièrement à risque pour les symptômes de dépression.
  • Comparativement au groupe majoritaire, les membres d’un groupe minoritaire obtiennent une prévalence plus élevée concernant la peur d’être contaminé en milieu de travail par le coronavirus de la COVID-19, alors que la prévalence de consommation de médicaments psychotropes est plus faible.
  • Les personnes interrogées pendant la pandémie de la COVID-19 montrent une prévalence de détresse psychologique plus élevée, mais plus faible pour l’épuisement professionnel.

Conclusion

Selon les données de l’ELOSMET, les atteintes à la santé mentale chez les personnes en emploi de cet échantillon sont importantes. La situation sanitaire liée à la COVID-19 s’associe à une détresse psychologique plus élevée, mais le passage en télétravail semble avoir diminué l’expérience de symptômes de fatigue, d’épuisement physique et psychologique lié au travail. Il faut cependant rester prudent sur cette possible diminution, car d’autres résultats de l’ELOSMET suggèrent que le télétravail est associé à des facteurs de risque de l’épuisement professionnel : demandes psychologiques (charge de travail, rythme de travail, demandes conflictuelles), nombre d’heures travaillées et conflits travail-famille5.

Les atteintes à la santé mentale sont plus importantes pour les femmes que les hommes, un écart relatif cependant plus faible pour la détresse psychologique et l’épuisement professionnel. Globalement, les femmes ont entre 27%-69% plus de chances que les hommes de rapporter des atteintes à la santé mentale. Les employés matures (50 ans et plus) ont une meilleure situation au plan des atteintes à la santé mentale, une situation pouvant possiblement s’expliquer par une grande expérience des tâches à accomplir ainsi que de meilleurs conditions de travail et de vie à l’extérieur du milieu de travail. Enfin, le fait d’appartenir ou pas à un groupe minoritaire semble avoir très peu d’influence sur les symptômes de santé mentale, bien qu’une légère différence semble exister pour la peur de la contamination au virus de la COVID-19 et la consommation de médicaments psychotropes.

Les résultats présentés ici seront mis à jour périodiquement.

Références

1. McDowell, I. & Newell, C. (1996) Measuring health: a guide to rating scales and questionnaires, 2nd edn. Oxford University Press, New York 2. Kroenke, K., Spitzer, R. L. & Williams, J. B. W. (2001). The PHQ-9: Validity of a brief depression severity measure. J Gen Intern Med, 16(9), 606-613. 3. Spitzer, R. L., Kroenke, K., Williams, J. B. W. & Löwe, B. (2006). A brief measure for assessing generalized anxiety disorder: The GAD-7. Archives of Internal Medicine166(10), 1092-1097. 4. Kristensen, T.S., Borritz, M., Villadsen, E. & Christensen, K.B. (2005) The Copenhagen Burnout Inventory: A new tool for the assessment of burnout, Work & Stress, 19(3), 192-207. 5. Observatoire sur la santé et le mieux-être au travail (2020). FLASH Recherche : Télétravail, conditions de travail et conflits travail-famille. Université de  Montréal. https://www.osmet.umontreal.ca/flash-recherche-teletravail-conditions-de-travail-et-conflits-travail-famille/

Site web: www.osmet.umontreal.ca

A propos de l’OSMET

L’Observatoire sur la santé et le mieux-être au travail (OSMET) est né d’une collaboration avec la Faculté des arts et sciences, l’Institut de recherche en santé publique (aujourd’hui devenu le Centre de recherche en santé publique) et l’École de relations industrielles de l’Université de Montréal. L’OSMET bénéficie du soutien financier de quatre partenaires fondateurs : Morneau Shepell, McKesson Canada, Croix Bleue Medavie et Pratt & Whitney Canada.

Ce contenu a été mis à jour le 12 juillet 2023 à 0h51.